Comme nous avons eu l’occasion de le mentionner à maintes reprises, la veille et la recherche d’information ne peuvent pas, la plupart du temps, être appréhendées à l’échelle d’une seule langue ou tout du moins du français.
De l’intérêt d’une veille multilingue
Tous les types de veilles, qu'elle soit concurrentielle, stratégique, marketing, réglementaire, scientifique, technique ou encore brevet sont concernés par le multilinguisme.
Prenez par exemple une veille concurrentielle dans le secteur de l’industrie : il y a tout de même de bonnes chances que certains concurrents soient basés ou disposent d’une présence à l’étranger pour leurs sites de production notamment. Un lancement de produit, un événement peut voir une résonance en dehors des frontières. Dès lors, suivre les retombées à l’international est également inévitable.
Et du côté de la veille scientifique et technique, on n’oubliera pas non plus qu’une grande partie des revues scientifiques sont en langue anglaise et non en français.
Veille stratégique et concurrentielle : la maîtrise de l’anglais peut-elle suffire ?
On serait tenter de penser qu’une bonne maîtrise de la langue anglaise pourrait suffire pour réaliser des veilles et des recherches d’informations à l’échelle planétaire.
Malheureusement il n’en est rien...
Lorsque l’on s’intéresse à des problématiques économiques ou politiques, on arrive toujours à obtenir quelques informations en langue anglaise.
Chaque pays ou presque dispose de quelques titres de presse en anglais, les sites institutionnels disposent généralement d’une version anglaise, les grands organismes internationaux susceptibles de couvrir l’actualité et les questions économiques de tous les pays du monde sont également en anglais, etc.
Mais dès qu’on aborde des questions sociétales, culturelles ou des événements avec un ancrage uniquement local, c’est une toute autre histoire...
D’ailleurs, il n’est pas rare que la version anglaise d’un site ne soit qu’une version très édulcorée de la version en langue locale !
Chez FLA Consultants, expert de la veille et de la recherche d’informations depuis plus de 40 ans, nous avons souvent l’occasion de constater que l’information la plus stratégique et la plus confidentielle se trouve bien souvent dans des sources locales.
Comment effectuer une veille multilingue sans maîtriser les langues en interne ?
Même s’il est possible que certains de vos collaborateurs disposent de quelques notions en allemand ou espagnol, il y a de grandes chances que vous ne trouviez aucun interlocuteur en interne pour le japonais, le polonais ou encore le finlandais.
Dans un contexte de veille, la question de la traduction se pose aussi bien au niveau de la phase de sourcing qui consiste à identifier les sources pertinentes à mettre sous surveillance que de la phase de collecte/analyse.
Au niveau du sourcing, il va falloir être en mesure de construire une requête intégrant les termes/expressions en langue locale et être capable d’identifier des sources d’informations pertinentes et fiables en langue locale. Tout un challenge !
Au niveau de la phase de collecte et d’analyse, il va être question ici de la compréhension des articles, pages Web, documents en langue locale récupérés lors de la phase de collecte.
C’est sur cette phase que nous avons choisi ici de nous focaliser.
Et avant même d’envisager la sous-traitance à des personnes/traducteurs maîtrisant les langues en question, il est intéressant de se pencher sur la question des outils de traduction automatiques.
Google Translate, Bing Translator et les autres...
Il y a encore quelques années, la qualité des traductions fournies par Google ou Bing était tellement mauvaise qu’on avait même du mal à comprendre le sens général d’un texte et qu’on risquait à coup sûr le contresens...
Mais avec le développement de l’intelligence artificielle, ces outils ont fait d’énormes progrès et permettent sans nul doute d’avoir une compréhension générale d’un texte.
Attention cependant, on n’est jamais à l’abri d’un contresens et copier-coller une traduction issue de ces outils directement dans un document de travail risque de vous faire passer pour un professionnel peu consciencieux...
DeepL : un outil de traduction prometteur
A l’été dernier, un petit nouveau a fait son apparition : DeepL. Derrière cette initiative, on retrouve les fondateurs de l’excellent dictionnaire en ligne Linguee. Un gage de qualité !
Les nombreux articles de presse et de blogs parus à son sujet sont élogieux. Nous avons eu l’occasion de l’utiliser à maintes reprises et avons pu apprécier la qualité de la rédaction : des contresens moins nombreux que chez ses concurrents et une traduction beaucoup plus proche d’une traduction « professionnelle ».
Mais alors, quel outil de traduction choisir ?
DeepL est sans nul doute l’outil à privilégier mais il ne peut malheureusement pas être utilisé en toutes circonstances :
- seules 7 langues sont aujourd’hui proposées (anglais, français, allemand, espagnol, italien, néerlandais et polonais)
- il existe une limite dans la taille du texte que l’on peut entrer (5000 caractères espaces compris) mais c’est finalement la même limite que celle introduite par Google Translate en 2016 ;
- il n’est pas possible d’entrer l’url d’une page Web pour la traduire à la volée ;
- il n’existe pas de plugin/add-on permettant de traduire directement une page Web.
Dans les cas où DeepL n’est pas adapté, on recommandera alors de se tourner vers Google Translate.
Les outils de traductions intégrés aux outils de veille et agrégateurs de presse et bases de données
On n’y pense peu mais un certain nombre d’outils de veille et d’agrégateurs de presse ont intégré des outils de traductions automatiques à leurs plateformes permettant ainsi à leurs utilisateurs de traduire d’un seul clic les articles récupérés dans d’autres langues.
Du côté des agrégateurs de presse, qui permettent d’interroger des dizaines de milliers de titres de presse en France et aux quatre coins du monde au sein d’une seule interface :
- Factiva a intégré depuis plusieurs années maintenant Google Translate. Néanmoins la traduction n’est pas disponible sur une liste de résultats mais nécessite d’ouvrir chaque article séparément et de cliquer sur la fonctionnalité de traduction.
- Chez LexisNexis, Nexis et Newsdesk ont aussi recours à Google translate mais permettent de traduire aussi bien des listes de résultats que des articles individuels.
On citera également des bases de données business comme EMIS (spécialisé sur les pays émergents) qui proposent le même service.
Et comme le soulignait très justement Marie-Pierre Vidonne (@VeilleOff), il ne faut pas non plus oublier les outils de traduction présents dans les bases de données brevets très efficaces pour les textes techniques.
Du côté des outils de veille, certains acteurs ont aussi intégré des solutions de traduction automatiques comme :
- Digimind Social ;
- Sindup ;
- Synthesio ;
- ou encore Talkwalker.
Même si la plupart des plateformes n’indiquent pas à quelle solution ils ont recours, ils s’agit rarement d’une solution interne et ils ont bien souvent recours à Google translate ou Bing Translator.
On signalera également que le lecteur de flux RSS Inoreader a intégré une solution de traduction automatique des articles dans sa version "Professional".
Pour la traduction appliquée au RSS, on ajoutera cette fonctionnalité intéressante proposée par Zapier qui permet de traduire automatiquement le contenu d'un flux RSS. Cette fonctionnalité nous a été signalée par Serge Courrier (@RSSCircus) à la suite de la parution de cet article.
Ne pas négliger la piste des traducteurs et des professionnels de l’information locaux
Ces outils de traduction apportent incontestablement une aide précieuse pour la veille et la recherche d’information. Néanmoins, il peut être utile d’aller plus loin surtout quand on souhaite aller au-delà de la compréhension générale vers une analyse plus fine et plus stratégique.
On ne saurait alors négliger le recours à des traducteurs professionnels mais aussi à des professionnels de l’information indépendants basés dans les pays que l’on souhaite surveiller.
Et même si, chez FLA Consultants, nous avons, nous aussi, évidemment recours aux outils de traduction automatique pour un premier niveau de veille et de recherche, nous avons également choisi de recruter des veilleurs et analystes multilingues et avons développé des partenariats avec des professionnels de l’information aux quatre coins du monde pour proposer le même niveau d’expertise quel que soit le pays.
Les professionnels de l’information de chaque pays disposent en effet d’une connaissance du marché, des sources, outils de recherche locaux et des contacts qu’aucun outil de traduction automatique ne pourra jamais remplacer...
Auteur : Carole Tisserand-Barthole, rédactrice en chef de BASES et NETSOURCES