Pour la veille et la recherche d’information, le moteur de recherche Google est un outil indispensable, du moins, pour rechercher sur le Web ouvert et gratuit et détecter des sources pertinentes dans le cadre du sourcing.
Les relations entre les professionnels de la veille et le géant américain sont cependant compliquées : dépossession de leur rôle d’intermédiaire auprès des usagers, désillusions quant à la stratégie à long-terme de Google, retrait régulier de produits et fonctionnalités très utilisées par les veilleurs, etc.
Une nouvelle fonctionnalité Google pour savoir dans quelle bibliothèque un ebook est disponible
Google vient tout juste d’annoncer une nouvelle fonctionnalité qui devrait, a priori permettre de donner plus de visibilité aux bibliothèques et à leurs catalogues. Mais est-ce une si bonne nouvelle ?
Désormais, lorsqu’un internaute recherche le titre d’un ouvrage, Google va indiquer dans quelles bibliothèques à proximité on peut obtenir l’ebook en question, à condition d’avoir activer la géolocalisation. Cette fonctionnalité fonctionne aussi bien sur ordinateur que sur mobile mais uniquement aux Etats-Unis pour le moment. D’après les premiers échos, Google n’inclut pas toutes les bibliothèques et cela semble dépendre des fournisseurs d’ebooks utilisés par les bibliothèques.
Comme toujours l’initiative de Google n’a sûrement rien de désintéressé, d’autant moins désintéressé que certains professionnels pointent déjà du doigt que cette nouvelle fonctionnalité permet au géant américain d’obtenir toujours plus de données personnelles et de réaliser un profiling des internautes encore plus affiné puisqu’il est nécessaire d’activer la géolocalisation pour en bénéficier.
D’autre part, cela s’inclut parfaitement dans la stratégie de Google et son « ère de l’assistance ». Il n’a plus vocation à être un moteur de recherche mais un assistant personnel qui vous guide, dans ce cas précis, de A à Z vers l’ouvrage dont vous aviez besoin.
On pourrait même aller plus loin en se demandant si, finalement, Google ne cherche pas tout simplement à remplacer les bibliothécaires.
"Bibliothèques, le Web est à vous"
Avec cette annonce de Google, on ne peut s’empêcher de faire le lien avec le récent ouvrage de Véronique Mesguich, « Bibliothèques, le Web est à vous » auquel nous avions consacré un article dans BASES en février dernier et désormais en accès libre sur notre site. Elle y incitait notamment vivement à conjuguer visibilité et innovation sur le Web.
Sauf qu’entre temps, Google est passé par là et a décidé de s’occuper de la promotion des bibliothèques à sa manière...
Et au delà de la relation entre Google et les bibliothèques, c’est toute la relation entre le géant américain et l’ensemble des professionnels de l’information qui pose question.
Peut-on se passer de Google ? Oui et non...
Face à ses nombreuses infidélités et trahisons quant à l’essence même de la recherche d’information, on pourrait être tenter de lui tourner le dos. Et même s’il nous « vole » en partie notre travail, peut-on véritablement se passer de Google ?
Malheureusement, pas vraiment ou pas totalement en tout cas... comme nous avons eu l’occasion de le montrer à plusieurs reprises :
- « Ces moteurs français qui cherchent à concurrencer Google : quel intérêt pour la veille ? »
- « Alternatives à Google, est-ce vraiment utile ? »
N’oublions pas toutefois que la recherche d’information sur le Web ne se résume pas uniquement à Google (on pensera bien évidemment aux bases de données, serveurs et agrégateurs de presse, plateforme de veille sur les médias sociaux, etc) et qu’une nouvelle génération d’outils de recherche commencent à voir le jour .
Il en sera question dans le prochain numéro de BASES dans un article intitulé « L’avenir de la recherche Web sera t-il thématique ? ».
Google : rivalité ou complémentarité avec les pro de l’info ?
Il faut bien avouer que, depuis son lancement en 1998, Google a révolutionné le monde de la recherche d’information et a très vite été perçu par certains professionnels comme une menace.
Tout le monde ou presque connaît et utilise Google et le premier réflexe de toute personne à la recherche d’informations est d’aller entrer quelques mots dans le moteur plutôt que d’aller consulter un professionnel de la recherche ou une bibliothécaire.
L’avantage, c’est que les usagers sont devenus plus autonomes dans leurs recherches, surtout pour les recherches les plus simples et cela permet donc de dégager plus de temps pour des tâches à plus forte valeur ajoutée.
A condition bien sûr que les usagers n’en oublient pas l’existence des professionnels des l’information et que les pros de l’info, eux-mêmes, mettent la barre très haut quant à leur degré d’expertise.
Le pro de l’info se doit d’être un expert
Nous avions eu l’occasion d’aborder cette question lors de l’atelier que nous avions animé au dernier salon i-expo : Entre intuition et méthodologie : la veille gagnante en 2017.
Le professionnel de l’information ne peut se contenter d’être « moyen», il se doit d’être un expert : un expert de tout ce qui a trait à la veille et la recherche (méthodologies, connaissances des sources et maîtrise technique des outils) et être en état d’acquérir rapidement la maîtrise des domaines sur lesquels il va être amené à travailler.
Chez FLA Consultants, cabinet de veille stratégique et d’intelligence économique depuis près de 40 ans, nous avons vu pu constater des évolutions notables en une dizaine d’années dans le rapport que les non professionnels de l’information ont avec la veille et la recherche.
Et il est indéniable que, dans les entreprises, les salariés sont de mieux en mieux armés et outillés pour réaliser des recherches par eux-mêmes et ont de plus en plus conscience de l’intérêt des outils de recherche professionnels payants.
Pour autant, recourir à un pro de l’info n’est pas nécessairement une évidence pour tout le monde...
Le professionnel de l’information se doit donc, on ne le dira jamais assez, d’être « hyper » spécialisé et technique pour tout ce qui a trait à la veille et la recherche d’information et de savoir communiquer et mettre en avant ses nombreux atouts. Et c’est le seul moyen pour lui d’apporter une réelle valeur ajoutée à son organisation.
Auteur : Carole Tisserand-Barthole, rédactrice en chef de BASES et NETSOURCES